Pendant trois jours, les scientifiques congolais et ceux venus d’autres horizons du monde, partagent et réfléchissent ensemble autour de la thématique de l’Afrique et la production des connaissances à l’ère de la mondialisation, dans un colloque international tenu ici à Lubumbashi dans le Haut-Katanga. La cérémonie inaugurale ces assises organisées par l’université de Lubumbashi en hommage au professeur Valentin Yves MUDIMBE a eu lieu le jeudi 23 mai 2019 au bâtiment du 30 juin. Plusieurs orateurs sont intervenus pour mettre en valeur le parcours du savant MUDIMBE et l’apport des connaissances scientifiques dans le développent de notre société par rapport à ses défis majeurs. Ces conférences s’étendent donc du 23 au 25 mai avec des ateliers de travail au musée de Lubumbashi.
Après HADAD ADNAN, KILANGA MUSINDE, NDAYWEL NWIEM, TAKIZALA MASOSO, MUYEMBE TAMFUM, BOGUMIL et le père VEERBEK, vient le tour de Valentin-Yves MUDIMBE de recevoir les insignes de doctorat Honoris Causa de l’Université de Lubumbashi. Homme de lettre, poète, écrivain, Professeur des universités, MUDIMBE est aujourd’hui considéré comme un savant et un apôtre de la science, tel que l’a affirmé le Professeur Gilbert KISHIBA FITULA, Recteur de l’UNILU. « Dans la faculté de Lettres, le savant Professeur Valentin-Yves MUDIMBE a forgé ses armes scientifiques qui lui ont permis de conquérir l’univers scientifique. Et ainsi il est devenu l’apôtre de la science. Partant de la République Démocratique du Congo, il a diffusé à travers le monde l’apport de l’Afrique », a-t-il déclaré.
Le numéro 1 de l’UNILU a rappelé le bien-fondé de ce colloque international qui invite, selon lui, les chercheurs à réfléchir sur l’apport de la science et des technologies pour le progrès de la société en général, et la RDC en particulier. « Il ne suffit plus pour un pays de disposer des ressources naturelles et d’être un scandale géologique pour créer la richesse nécessaire pour le bien-être de sa population dans la perspective de développement intégral, il faut aussi la mise en valeur de ces ressources naturelles, potentialités qui passent de façon incontournable par la production des connaissances scientifiques et les innovations technologiques qui constituent le moteur de développement capable d’inverser le paradigme au point de projeter un pays sur l’orbite des grandes puissances » soutient Monsieur le Recteur.
Pour la RDC, ajoute-t-il, « les pays émergents se mesurent au nombre de publications, productions scientifiques. Pas de Congo émergent sans les connaissances scientifiques et les innovations technologiques, pas de Congo émergent sans une implication des scientifiques, sans une recherche universitaire de standard international. »
Le gagnant du prix Honoris Causa de l’Université d’Anvers, le Professeur MUYEMBE TANFUM, a aussi démontré littéralement l’importance des recherches scientifiques dans la résolution des problèmes sociaux. Il a puisé ses arguments dans son expérience sur les recherches dans le domaine du VIH Sida et de la maladie à Virus Ebola pour lesquelles son courage et son travail lui ont valu plusieurs récompenses. et a rassuré que bientôt, Ebola sera une maladie comme toutes les autres avec un vaccin spécifique pour son traitement.
Le Professeur MUYEMBE a ainsi invité tous les chercheurs à conjuguer davantage des efforts afin de forger une République Démocratique du Congo forte. « L’université a un rôle important dans un pays, il est temps de faire de la recherche orientée vers des problèmes sociaux. Prenons donc les choses en mains dans tous les domaines car il y a moyen que chacun puisse briller. Ce n’est pas normal de quitter ce monde sans laisser des traces en tant que scientifique », a-t-il conclu.
V.Y.MUDIMBE, un monument, un producteur des connaissances
Durant la cérémonie d’ouverture du colloque, le Recteur Honoraire Julien KILANGA MUSINDE a établi un pont entre la production des connaissances et le producteur des connaissances en partant des deux ouvrages de MUDIMBE à savoir « Réflexion sur la vie quotidienne » et « les corps glorieux des mots et des êtres ». « A partir de ma perception de MUDIMBE face aux exigences de production de connaissances en Afrique à l’ère de la mondialisation, ce colloque m’a inspiré une réflexion qui étale dans mon esprit une image de cet homme perçu comme un faisceau lumineux au visage perceptible à distance … Au contact de la personne elle-même et de ses œuvres littéraires et scientifiques, je me suis fait une idée de cet homme qui est un monument non seulement pour les gens qui le connaissent mais aussi pour ceux qui trouvent, dans la science, la voix royale vers le progrès de l’humanité » a dit Julien KILANGA.
Le Professeur Antoine TSHITUNGU a pour sa part qualifié Valentin-Yves MUDIMBE d’homme de proue et d’ensemencement, de figure de l’écart, de créativité inouïe. Bien plus, « un homme-bibliothèque », d’une érudition inépuisable, mais aussi une créature humaine qui incarne, cultive et dissémine les vertus de l’humilité. « Nous honorons, en ce jour, un homme aux frontières des savoirs et des cultures, et conscient de leurs limites et contradictions, comme de leurs richesses et de la nécessité de les partager. Il a bâti souvent dans la solitude et le doute, quelques fois sous les crachats et les quolibets, une œuvre cathédrale, une citadelle imposante, une pyramide de sa façon, que nous avons le devoir impérieux de pérenniser. L’ensemble des essais de Mudimbe remet à plat les modèles d’analyse ainsi que les pratiques de connaissance qui relèvent de l’africanisme et de ses avatars. Fort de ses lectures incessantes de Foucault et de Freud, entre autres figures de référence de son Panthéon intellectuel, Mudimbe postule une parenté, une similitude entre la dépendance de l’Afrique vis-à-vis de l’Occident et le lien entre le fils et son père abusif », a-t-il déclaré.
Il sied de noter qu’au-delà de la production des connaissances littéraires et scientifiques de Mudimbe, plusieurs questions seront abordées par des chercheurs durant ce colloque. Il s’agit notamment des questions liées à la biodiversité, à la politique, l’anthropologie, au droit, ainsi qu’au numérique.
Arsène BIKINA