Le jeudi 25 mai est considéré comme férié dans quelques pays africains. Outre le repos bien mérité qui en découle pour les africains et les africaines vivant dans ces pays, une forte symbolique d'appel et de rappel, sinon de diffusion de la culture particulière en tant que socle pour créer la disposition pour une collective projection dans la mise en œuvre du rêve des pères fondateurs du panafricanisme, que dis-je, du rêve des États-Unis d'Afrique est charriée par un tel congé. En remontant à 1963, le 25 mai rappelle cette date marquant le démarrage de la Conférence des chefs d'état et de gouvernement dont les travaux vont décider de la création de l’Organisation de l'Unité africaine qui va être remplacée par l’Union africaine en 2022.
La session fondatrice de l’OUA s’étant tenue à Addis Abeba sous le leadership d’Hailé Sélassié, cette date a été retenue comme fériée dès 1963 en Ethiopie pour maintenir le flambeau de l’esprit panafricain. La flamme de cet horizon de l’unité africaine déjà allumée dans les cœurs des Africaines et des Africains se doit d’être entretenue. En 2019, la Commission de l’Union africaine a retenu ainsi que la date du 25 mai soit célébrée en Afrique et érigée en journée fériée pour que cela aide à renforcer l’unité africaine et à promouvoir la fierté et l’identité africaines. Beaucoup d’organisations et groupes de la société civile de ce continent plaident dans ce sens. Quelques pays africains ont déjà inscrit cette date du 25 mai comme une journée fériée : c’est le cas de la Gambie, du Ghana, de la Guinée, du Lesotho, du Mali, de la Mauritanie, de la Namibie, de la Zambie, du Zimbabwe.
La Zambie, pays limitrophe de la RDC a observé cette date en cette année et le gouvernement a organisé une manifestation sportive dans la Capitale Lusaka en
faisant vibrer des spectateurs pendant 90 minutes avec une rencontre sportive entre les joueurs Zambiens et les joueurs de l’équipe espagnole Barça. En Afrique du Sud, alors que cette journée n’était pas déclarée fériée, la Présidence de la République a organisé une cérémonie dans la périphérie de Johannesburg, « au lieu très symbolique du ‘Berceau de l’humanité’, un site paléontologique où ont été retrouvés de nombreux restes d’hommes préhistoriques », selon le reportage de Romain Chanson de RFI. Le discours du Chef de l’Etat sud-africain en a appelé à la politique de non alignement pour préserver la souveraineté et l’indépendance des Etats africains des pressions de certaines puissances étrangères comme les Etats-Unis qui veulent introduire, dans leur rivalité avec la Russie, des conditionnalités auprès des pays africains en ce continent.
Cette journée de l’Afrique s’est passée sans que le gouvernement congolais ne passe, un instant, son temps à faire cas, même dans une déclaration publique, de la question de l’Unité africaine. Des entretiens avec quelques étudiants nous ont alerté sur l’importance de l’inscription de certains faits historiques dans le devoir de la mémoire de la jeunesse et de l’opinion publique pour consolider certaines valeurs et attitudes dans ce champ de la construction de l’imaginaire de l’idéal panafricain. Grand pays en Afrique par sa superficie et la diversité de ses ressources, la RDC a besoin d’une culture stratégique par une intelligence d’action à l’interne et à l’international dans plusieurs domaines y compris celui d’être au front de la mise en mouvement de l’horizon de la construction de l’idéal panafricain. En RDC, on peut ne pas décréter une journée fériée, mais que le gouvernement congolais s’investisse pour valoriser cette date à travers le ministère de la Culture pour maintenir le flambeau de l’idéal de l’Unité africaine : il n’y a pas que la danse que l’on peut célébrer et organiser ; d’autres manifestations d’esprit peuvent s’inviter lors de cette journée pour avoir une génération des Congolais ouverts à l’Afrique qui soient informés sur ce défi.
Germain Ngoie Tshibambe
Professeur ordinaire au Département des Relations internationales
Université de Lubumbashi/RDC